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Annulation d’un refus de mutation à la Réunion au titre du mouvement 2016

Annulation d’un refus de mutation à la Réunion au titre du mouvement 2016

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS

N° 1613258/5-1



M. S S


 


  1. Guiader Rapporteur


Mme Weidenfeld Rapporteur public


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

Le tribunal administratif de Paris (5ème  Section – 1ère Chambre)

Audience du 8 juin 2017

Lecture du 22 juin 2017



36-05-01-02

36-07-02-002

C

 

Vu la procédure suivante :

 

Par une requête, enregistrée le 26 août 2016, M. S S, représenté par la SCP Arents Trennec, demande au tribunal :

 

1°) d’annuler les décisions par lesquelles le ministre de l’intérieur, à l’issue de la commission administrative paritaire du 24 juin 2016, a rejeté sa demande de mutation et a prononcé la mutation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt, M. Wl Sn, M. Je Ls et M. Ji Ct au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016 ;

 

2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761- 1 du code de justice administrative.

 

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision implicite de rejet de sa demande de mutation :

–                 cette décision est entachée d’un défaut de motivation ;

–                 elle est entachée d’un vice de procédure en ce que la commission administrative paritaire nationale du 24 juin 2016 était irrégulièrement composée au regard des dispositions de l’article 35 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

–                 elle est entachée d’un vice de procédure en ce que les documents relatifs à sa demande de mutation n’ont pas été communiqués aux membres de la commission administrative paritaire au moins huit jours avant la date de la séance, en méconnaissance de l’article 39 du décret n° 82- 451 du 28 mai 1982 ;

–          elle est entachée d’un vice de procédure en ce que les trois quarts des membres de la commission n’étaient pas présents à la date de la séance du 24 juin 2016 en méconnaissance de l’article 41 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

–  elle est entachée d’erreur manifeste d’appréciation ;

–          elle a été prise en méconnaissance du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires d’un même corps ;

 

En ce qui concerne les décisions portant mutation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt, M. Wl Sn, M. Je Ls et M. Ji Ct au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016 :

–          ces décisions sont entachées d’un vice de forme en ce qu’elles ne sont pas signées et ne comportent ni le nom, ni le prénom, ni la qualité des signataires ;

–  elles ont été prises par des autorités incompétentes car non identifiables ;

–          elles sont entachées d’un vice de procédure dès lors que la commission administrative paritaire nationale du 24 juin 2016 n’a émis aucun avis sur les décisions de mutation en cause ;

–          les candidats ont été inscrits sur le tableau de mutation par ordre alphabétique et non selon des critères de priorité en méconnaissance de l’article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

–          les dossiers des fonctionnaires ayant fait l’objet des décisions de mutation attaquées n’ont pas fait l’objet d’un examen individuel ;

–          les décisions de mutations de ces fonctionnaires de police sont entachées d’erreur manifeste d’appréciation.

 

Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2017, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la

requête.

 

Il fait valoir que :

–          les conclusions à fin d’annulation dirigées contre les décisions de mutation de M. Ji Ct et M. Je Ls, brigadiers de police sont irrecevables, pour défaut d’intérêt à agir ;

–  les moyens soulevés par M. S ne sont pas fondés.

 

Par une lettre en date du 18 mai 2017, les parties ont été informées, par application des dispositions de l’article R. 611-7 du code justice administrative, de ce que le jugement à intervenir était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office, tiré de l’irrecevabilité des conclusions à fin d’annulation dirigées contre les décisions de mutation de M. Ji Ct et

  1. Je Ls, brigadiers de police, pour défaut d’intérêt à agir, dès lors que le requérant est gardien de la paix.

Vu les autres pièces du dossier. Vu :

–  la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

–  la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

–  le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

–  le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

–  le code de justice administrative.

 

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

 

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

–  le rapport de M. Guiader,

–  les conclusions de Mme Weidenfeld, rapporteur public,

–  et les observations de Mme Rahmouni, représentant le ministre de l’intérieur.

 

  1. Considérant que M. S, gardien de la paix affecté à la CRS 46 de Sainte-Foy-Lès- Lyon, a déposé le 15 avril 2016 une candidature tendant à ce que soit prononcée sa mutation au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion ; qu’une décision implicite de rejet est née du silence gardé sur sa demande, pendant plus de deux mois, par le ministre de l’intérieur ; que celui-ci a prononcé l’affectation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt, M. Wl Sn, M. Je Ls et M. Ji Ct au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016 ; que, par la présente requête, M. S demande l’annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur a rejeté sa demande de mutation et des décisions portant affectation des agents susmentionnés ;

 

Sur les conclusions à fin d’annulation de la décision implicite de rejet de la demande de mutation de M. S :

 

  1. Considérant qu’aux termes de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 : « L’autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires (…) Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelle du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité lorsqu’ils produisent la preuve qu’ils se soumettent à l’obligation d’imposition commune prévue par le code général des impôts, aux fonctionnaires handicapés (…) et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions (…) dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles. Priorité est également donnée aux fonctionnaires placés en situation de réorientation professionnelle pour les emplois correspondant à leur projet personnalisé d’évolution professionnelle (…) » ; que, lorsque dans le cadre d’un mouvement de mutation, un poste a été déclaré vacant, alors que des agents se sont portés candidats dans le cadre du mouvement, l’administration doit procéder à la comparaison des candidatures dont elle est saisie en fonction, d’une part, de l’intérêt du service, d’autre part,  si celle-ci est invoquée, de la situation de famille des intéressés, appréciée compte tenu des priorités fixées par les dispositions de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ;

 

  1. Considérant que M. S soutient qu’il est séparé géographiquement depuis 68 mois de son épouse qui exerce la profession d’enseignante dans le département de La Réunion ; qu’il ressort des pièces du dossier que l’intéressé a déposé une demande de mutation au titre du rapprochement de conjoint au titre de l’année 2016 ; que, faute pour l’administration d’établir l’existence de motifs tirés de l’intérêt du service, justifiant le choix du ministre de l’intérieur de rejeter la demande de mutation de M. S, celui-ci est fondé à soutenir que la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur a refusé de prononcer sa mutation au titre de l’année 2016, est entachée d’illégalité ;

 

  1. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur a refusé de prononcer la mutation de M. S au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion au titre de l’année 2016, doit être annulée ;

 

 

 

Sur les conclusions à fin d’annulation de la décision de mutation de M. Je Ls et M. Ji Ct au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016 :

 

  1. Considérant que les décisions par lesquelles le ministre de l’intérieur a prononcé la mutation de M. Ji Ct et M. Je Ls, brigadiers de police, au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016, ne font pas grief à M. S, dès lors que celui-ci détient le grade de gardien de la paix ; que, par suite, M. S n’est pas recevable à demander l’annulation des décisions par lesquelles le ministre de l’intérieur a prononcé la mutation de Ji Ct et Je Ls au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion au titre de l’année 2016 ;

 

Sur les conclusions à fin d’annulation des décisions portant mutation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt et M. Wl Sn au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, à compter du 1er septembre 2016 :

 

  1. Considérant, en premier lieu, que M. S soutient que les décisions attaquées, sont entachées d’incompétence ; que, toutefois, par jugement de ce jour rendu dans l’affaire opposant

M. Chereau au ministre de l’intérieur, dans laquelle a été notamment produit le télégramme n° 16-743 du 4 juillet 2016 contenant les décisions de mutation attaquées, le tribunal a considéré  que ce moyen manquait en fait dès lors que ledit télégramme est signé par Mme Sylvie Hervé- Magne, attachée principale d’administration de l’Etat, adjointe au chef du bureau des gradés et gardiens de la paix, qui disposait d’une délégation de signature à cette fin, consentie par une décision du 5 février 2015 de la directrice des ressources et des compétences de la police nationale, régulièrement publiée au journal officiel le 7 février 2015 ; que, par suite, le moyen  tiré de l’incompétence du signataire des actes attaqués doit être écarté ;

 

  1. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les demandes de mutation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt et M. Wl Sn n’auraient pas fait l’objet d’un examen particulier par la commission administrative paritaire, lors de sa séance du 24 juin 2016 ni que ladite commission n’aurait pas rendu un avis sur les mutations en cause ; qu’en outre, il ne résulte d’aucun texte ni d’aucun principe que l’administration serait dans l’obligation de faire figurer sur le tableau des mutations les agents par ordre de mérite et non par ordre alphabétique ;

 

  1. Considérant, en troisième lieu, que M. S soutient que les décisions attaquées méconnaissent les dispositions de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 dès lors sa situation de famille rendait sa demande de mutation prioritaire sur celles de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt et M. Wl Sn ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n’est pas allégué par le ministre de l’intérieur, qu’un nombre limité de postes proposés à la mutation au sein du secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion au titre de l’année 2016 figurait sur la liste des postes polyvalents vacants, publiée par l’administration ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le ministre de l’intérieur aurait commis une erreur manifeste d’appréciation et violé le principe d’égalité de traitement entre fonctionnaires d’un même corps, en mutant M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt et M. Wl Sn au sein du secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion doit être écarté ;

 

 

  1. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. S n’est pas fondé à demander l’annulation des décisions par lesquelles le ministre de l’intérieur a prononcé la mutation de M. D N, M. S Nl, M. Sb Pt, M. Jn Pt, M. Ns Pt et M. Wl Sn au sein du secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion au titre de l’année 2016 ;

 

Sur les conclusions à fin d’injonction :

 

  1. Considérant que, eu égard à son motif d’annulation, le présent jugement implique nécessairement, sous réserve d’un changement de circonstances de droit ou de fait, que le ministre de l’intérieur procède à la mutation de M. S au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion ; qu’il y a lieu d’enjoindre au ministre de l’intérieur d’y procéder dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement ;

 

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

 

  1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

« Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

 

  1. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat, qui a la qualité de partie perdante, le versement à M. S d’une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

 

 

 

D E C I D E :

 

Article 1 : La décision implicite du ministre de l’intérieur de rejet de la demande de mutation de M. S au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion au titre de l’année 2016 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l’intérieur de procéder à la mutation de M. S  au secrétariat général pour l’administration de la police (SGAP) de La Réunion, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement.

 Article 3  : L’Etat versera à M. S la somme de 1 000 euros en application de l’article L761-1 du code de justice administrative.

 

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. S est rejeté.

 

 

 

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. S S, au ministre de l’intérieur, à M. D N, à M. S Nl, à M. Sb Pt, à M. Jn Pt, à M. Ns Pt, à M. Wl Sn, à M. Ji Ct et à M. Je Ls.

 

Délibéré après l’audience du 8 juin 2017, à laquelle siégeaient : Mme Viard, président,

M. Guiader, premier conseiller,

M. Even, conseiller,

 

 

Lu en audience publique le 22 juin 2017.

 

 

Le rapporteur,

 

 

 

 

V. GUIADER


Le président,

 

 

 

 

M-P. VIARD

 

 

 

 

 

Le greffier,

 

 

 

 

R. LALLEMAND

 

 

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.