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AVANCEMENT DANS LA POLICE : nouveau jugement d’annulation

AVANCEMENT DANS LA POLICE : nouveau jugement d’annulation

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS

 

N°1909977/5-1

MA

Mme Lambrecq Rapporteure

Schaeffer Rapporteur public

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 Le tribunal administratif de Paris (5ème section – 1ère chambre)

Audience du 8 décembre 2022

Décision du 5 janvier 2023

 

36-10-01

C

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 9 mai 2019, et trois mémoires complémentaires, enregistrés le 7 avril 2020, le 10 août 2020 et le 13 octobre 2021, M. A, représenté par Me Trennec, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler l’arrêté du ministre de l’intérieur du 22 mai 2019 portant tableau d’avancement au grade de commandant de la police nationale au titre de l’année 2019 ;

2°) d’annuler les décisions de nomination au grade de commandant de police au titre de l’année 2019, prises sur le fondement du tableau d’avancement ou, à défaut, d’annuler les décisions individuelles d’avancement de Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG,

3°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur d’établir un nouveau tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 et d’y inscrire M.A dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 5 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, au titre du préjudice matériel et moral qu’il a subi ;

5°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

l’arrêté du 22 mai 2019 portant tableau d’avancement est entaché d’un vice de procédure tiré de l’irrégularité de la composition de la commission administrative paritaire nationale compétente pour l’avancement au grade de commandant de police dès lors que deux représentantes syndicales ayant candidaté à cet avancement et ayant été nommées au grade de commandant de police lors de cette séance ont participé aux débats de cette commission, en méconnaissance des dispositions de l’article 38 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

  • il est entaché d’un vice de procédure tiré de ce que la commission administrative paritaire nationale a statué en formation plénière et non en formation restreinte ;
  • l’arrêté attaqué est entaché d’une erreur de droit tiré de la méconnaissance de l’article 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 dès lors que Mmes T et T ne remplissaient pas la condition d’ancienneté dans le grade de capitaine imposée par cet article pour pouvoir être promue au grade de commandant de police ;
  • il n’a pas été précédé d’un examen approfondi de la valeur professionnelle et des acquis de l’expérience professionnelle des intéressés ;
  • il a été pris en méconnaissance du principe d’égalité des fonctionnaires appartenant à un même corps, l’expérience et les acquis professionnels de certains fonctionnaires inscrits étant largement inférieurs à celle de M. A;
  • il est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation dès lors que l’administration a nommé au grade de commandant de police des capitaines de police occupant des postes dont le niveau de responsabilité ne permettait pas de les promouvoir au grade supérieur ;
  • il est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation dès lors qu’il justifie de mérites professionnels supérieurs à ceux des agents promus ;
  • les décisions de nominations de X doivent être annulées par voie de conséquence de l’illégalité du tableau d’avancement ;
  • ces décisions sont entachées d’erreur manifeste d’appréciation et de violation du principe d’égalité des fonctionnaires appartenant à un même corps ;
  • l’illégalité du refus de l’inscrire au tableau d’avancement au grade de commandant de la police nationale au titre de l’année 2019 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat ;
  • cette faute lui a causé un préjudice financier, un préjudice moral et un préjudice de carrière, évalués à 5 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2020, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

les conclusions de la requête sont irrecevables en l’absence de production de l’arrêté du 22 mai 2019 et des décisions de nomination attaquées conformément à l’article L.412-1 du code de justice administrative ;

  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 30 juin 2020 et le 1er décembre 2022, ce dernier mémoire, enregistré après la clôture de l’instruction, n’ayant pas été communiqué, Mme h T, représentée par Me Gernez, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation de l’avis de la commission administrative paritaire nationale, qui ne constitue pas une décision administrative faisant grief ;
  • elle est enfin irrecevable dès lors que M. A n’a pas intérêt à agir contre l’arrêté la nommant au grade de commandant de police ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2020, M. RN conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 août 2020, M.UC conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 août 2020, Mme BS conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2020, Mme OD conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2020, M. FH conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2021, Mme UO conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A le versement d’une somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

  • la requête est irrecevable dès lors qu’elle tend à obtenir l’annulation d’une décision inexistante au jour de l’enregistrement de la requête ;
  • elle est également irrecevable en l’absence de production de la décision attaquée conformément à l’article R. 412-1 du code de justice administrative ;
  • à titre subsidiaire, les moyens soulevés par A ne sont pas fondés.

La procédure a été communiquée à Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG, qui n’ont pas produit de mémoires en défense.

Par une ordonnance du 22 juillet 2022, la clôture de l’instruction a été fixée au 29 août 2022, à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

  • la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
  • le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;
  • le décret n° 2005-1090 du 1er septembre 2005 ;
  • l’arrêté du 28 janvier 2019 fixant pour l’années 2019 les taux de promotion pour l’avancement de grade de commandant de police dans le corps de commandement de la police nationale du ministère de l’intérieur pour l’année 2019 ;
  • le code de justiceLes parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience. Ont été entendus au cours de l’audience publique :
  • le rapport de Mme Lambrecq,
  • les conclusions de Schaeffer, rapporteur public,
  • et les  observations  de    Massonneau,  représentant  syndical  représentant A.

 

 

Considérant ce qui suit :

 

  1. A, entré dans la police nationale le 5 septembre 1995, est titulaire du grade de capitaine de police depuis le 1er juin 2013. Depuis le 12 mars 2018, il exerce les fonctions de chef de service judiciaire du système d’alerte et d’informations aux populations au sein de la circonscription de sécurité publique de Stains (93). Le 25 octobre 2018, M. A a présenté sa candidature pour l’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019, qui a reçu un avis favorable de sa hiérarchie. A l’issue de sa séance s’étant tenue le 26 mars 2019, la commission administrative paritaire nationale (CAPN) compétente à l’égard du corps de commandement de la police nationale n’a pas proposé M. A pour l’accès au grade de commandant de police au titre de l’année 2019. Par un arrêté du 22 mai 2019, le ministre de l’intérieur a fixé le tableau d’avancement pour l’accès au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 et a promu à ce grade les agents concernés. Par la présente requête, et dans le dernier état de ses écritures, M. A demande au tribunal d’annuler l’arrêté du 22 mai 2019 relatif au tableau d’avancement au grade de commandant de police ainsi  que  les  nominations  dans  le  grade  de  commandant  de  police  de Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UKMme,OPM.JK,M.FG

Sur les fins de non-recevoir opposées en défense :

 

  1. En premier lieu, aux termes de l’article 412-1 du code de justice administrative :

« La requête doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l’article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. ».

  1. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier électronique du 9 mai 2019, reçu le même jour, le requérant a demandé à l’administration de lui communiquer l’arrêté portant tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 ainsi que les arrêtés des agents dont il conteste la nomination. Dès lors, M. A étant dans l’impossibilité de produire ces arrêtés, la fin de non-recevoir tirée de la méconnaissance des dispositions de l’article R. 412-1 du code de justice administrative doit être écartée.
  2. En deuxième lieu, Mme JC, M. GC Mme CM, QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC, Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG  soutiennent que les conclusions dirigées contre l’arrêté portant tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 sont irrecevables au motif que la requête ayant été introduite le 9 mai 2019, soit avant l’intervention de cet arrêté, pris le 22 mai 2019, tend à l’annulation d’une décision inexistante. Aux termes de l’article R. 421-1 du code de justice administrative : « La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ». Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l’administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l’intervention d’une telle décision en cours d’instance régularise la requête, sans qu’il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l’administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l’absence de décision. Par suite, la fin de non-recevoir est écartée.
  3. En troisième lieu, contrairement à ce qui est soutenu par Mme T, la requête de M. A ne tend pas à obtenir l’annulation de l’avis de la commission administrative paritaire nationale du 16 mars 2019. La fin de non-recevoir soulevée en ce sens doit donc être écartée.
  4. En quatrième lieu, tout agent a intérêt à poursuivre l’annulation des nominations et promotions faites soit à son grade, soit aux grades supérieurs de son corps, soit dans un corps différent dont les agents sont susceptibles de se trouver en concurrence avec lui pour l’accès par voie d’avancement normal à des grades ou emplois supérieurs. Dès lors, la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de A contre la nomination de Mme T doit être écartée.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre l’arrêté du 22 mai 2019 relatif au tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 :

 En premier lieu, aux termes de l’article 38 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 qui prévoit que : « Les fonctionnaires ayant vocation à être inscrits à un tableau d’avancement ne peuvent prendre part aux délibérations de la commission lorsque celle-ci est appelée à délibérer sur ce tableau d’avancement ».

  1. Il ressort du procès-verbal de la séance de la commission administrative paritaire nationale du 26 mars 2019 qui a statué sur l’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019, que deux représentantes syndicales ayant été nommées au grade de commandant de police au cours de cette séance ont participé aux débats de cette réunion avec voix délibérative. Si le ministre soutient en défense que rien ne permet de penser que ces représentantes syndicales ne se seraient pas absentées lors de la délibération relative à l’avancement au grade de commandant, il ne l’établit cependant pas, en l’absence notamment de toute mention dans le procès-verbal qui confirmerait que les intéressées ont bien quitté la salle lors des débats. Par suite, le moyen tiré de l’existence d’un vice de procédure à raison de l’irrégularité de la composition de de la commission administrative paritaire nationale du 26 mars 2019, qui est susceptible d’avoir eu une influence sur le sens des résultats de cette séance et qui a privé le requérant d’une garantie, doit être accueilli.
  2. En second lieu, aux termes de l’article 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors applicable : « – Sous réserve des nécessités du service, le fonctionnaire en position d’activité ou de détachement qui, pour l’exercice d’une activité syndicale, bénéficie d’une décharge d’activité de services ou est mis à la disposition d’une organisation syndicale, est réputé conserver sa position statutaire. II.- Le fonctionnaire qui bénéficie, depuis au moins six mois au cours d’une année civile, de l’une des mesures prévues au I et qui consacre la totalité de son service à une activité syndicale a droit, dès la première année, à l’application des règles suivantes : (…) 3° Lorsqu’il réunit les conditions fixées par le statut particulier de son corps ou cadre d’emplois pour bénéficier d’un avancement de grade au choix, ce fonctionnaire est inscrit, de plein droit, au tableau d’avancement de grade, au vu de l’ancienneté acquise dans ce grade et de celle dont justifient en moyenne les fonctionnaires titulaires du même grade relevant de la même autorité de gestion et ayant accédé, au titre du précédent tableau d’avancement et selon la même voie, au grade supérieur. / III. -Le fonctionnaire occupant un emploi à temps complet qui bénéficie de l’une des mesures prévues au I et qui consacre une quotité de temps de travail au moins égale à 70 % et inférieure à 100 % d’un service à temps plein à une activité syndicale est soumis au (…) ».
  3. Ces dispositions consacrent un droit à l’avancement pour un fonctionnaire bénéficiant d’une décharge totale d’activité pour l’exercice d’un mandat syndical qui est déterminé, chaque année, par référence à l’avancement moyen des fonctionnaires du corps auquel il appartient. Cet avancement moyen est apprécié en calculant la moyenne de l’ancienneté des agents qui détiennent le même grade ou classe dans le corps auquel appartient le fonctionnaire déchargé de service et qui ont été promus au grade d’avancement au titre du ou des précédents tableaux.
  4. Il ressort des pièces du dossier que Mme T et Mme T, placées en décharge d’activité pour l’exercice de leur mandat syndical ont toutes deux été promues au grade de commandant de la police nationale avec une ancienneté de six ans. M. A soutient, sans être contredit sur ce point, que la moyenne de l’ancienneté des fonctionnaires promus au titre des précédents tableaux s’élève à 9,7 ans. Dès lors, le requérant est fondé à soutenir que l’arrêté du 22 mai 2019 a été pris en violation des dispositions précitées.
  1. En troisième lieu, aux termes de l’article 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat : « L’avancement de grade a lieu de façon continue d’un grade au grade immédiatement supérieur. Il peut être dérogé à cette règle dans les cas où l’avancement est subordonné à une sélection professionnelle. (…) Sauf pour les emplois laissés à la décision du Gouvernement, l’avancement de grade a lieu, selon les proportions définies par les statuts particuliers, suivant l’une ou plusieurs des modalités ci-après : 1° Soit au choix, par voie d’inscription à un tableau annuel d’avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l’expérience professionnelle des agents ,· 2° Soit par voie d’inscription à un tableau annuel d’avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, après une sélection par voie d’examen professionnel. (…) Les promotions doivent avoir lieu dans l’ordre du tableau ou de la liste de classement (…) ». Aux termes de l’article 59 de la même loi : « L’avancement des fonctionnaires bénéficiant, pour l’exercice de mandats syndicaux, d’une décharge d’activité de service accordée pour une quotité minimale de temps a lieu sur la base de l’avancement moyen des fonctionnaires du corps auquel les intéressés appartiennent. (…) ».
  2. Il ressort des pièces du dossier que Mme T et Mme T bénéficient d’une décharge d’activité de service pour l’exercice d’un mandat syndical. Dès lors, elles relevaient, pour leur avancement, des prescriptions énoncées ci-dessus et l’administration n’avait pas à comparer leurs mérites professionnels à ceux de M. A pour établir le tableau d’avancement. Il s’ensuit que M. A ne peut utilement soutenir que l’administration aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de leurs mérites comparés.
  3. En quatrième lieu, aux termes de l’article 17 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : « Pour l’établissement du tableau d’avancement de grade qui est soumis à l’avis des commissions administratives paritaires, il est procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents susceptibles d’être promus compte tenu des notes obtenues par les intéressés, des propositions motivées formulées par les chefs de service et de l’appréciation portée sur leur manière de servir. Cette appréciation prend en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s’y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le fonctionnaire et l’ancienneté. ». En outre, en vertu de l’article 15 du décret n° 2005-716 du 29 juin 2005 portant statut particulier du corps de commandement de la police nationale : « Peuvent être nommés au grade de commandant de police au choix, par voie d’inscription sur un tableau annuel d’avancement, après avis de la commission administrative paritaire, les capitaines de police qui comptent au moins douze ans de services effectifs depuis leur titularisation dans le corps de commandement de la police nationale, et qui remplissent les conditions suivantes : 1° Avoir satisfait dans le grade de capitaine à une obligation de deux mobilités géographique ou fonctionnelle. Toutefois, la seconde mobilité peut être accomplie à l’occasion de la nomination dans le grade de commandant et 2° Avoir satisfait dans le grade de capitaine, après leur inscription au tableau annuel d’avancement au grade de commandant, à une obligation de formation professionnelle dont la durée ne saurait excéder six semaines et dont le contenu et les modalités sont fixés par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé de la fonction publique ».
  1. Le juge de l’excès de pouvoir, saisi d’un recours tendant à l’annulation d’un arrêté portant inscription au tableau d’avancement et nomination dans un grade supérieur, ne peut se borner, dans le cadre de son contrôle restreint, à apprécier la valeur professionnelle d’un candidat écarté, et doit analyser les mérites comparés de cet agent et de ceux des autres agents candidats à ce même grade.

A n’établit ni même n’allègue disposer de mérites supérieurs à Ms V D, JN, EY, et RM dont les candidatures à l’avancement ont été retenues. Dès lors, le moyen tiré de l’erreur manifeste dans l’appréciation des mérites comparés de ces candidats doit être écarté.

 

  1. Il ressort des pièces du dossier que le requérant, fonctionnaire de police depuis 1995 et titulaire du grade de capitaine depuis 2013, a occupé de décembre 2017 à mars 2018, des fonctions d’adjoint au chef du secteur d’Antony, relevant d’une thématique sensible. En sa qualité de chef de service judiciaire SAIP à Stains qu’il occupe depuis mars 2018, il exerce un poste à forte responsabilité qui lui confère le commandement de 40 enquêteurs et la direction de toute la chaîne de l’investigation depuis l’accueil du public, la prise de plainte jusqu’aux enquêtes les plus complexes. Ce poste, nomenclaturé N 4G, soit le niveau le plus élevé de cotation, s’exerce au demeurant dans des conditions zonales particulièrement difficiles et avec un fort taux de rotation des effectifs. Il s’est vu attribuer la note de 6/7 en 2016, 7/7 au titre de 2017 et 6/7 en 2018, et bénéficie, en dépit d’une baisse d’un point de notation pouvant s’expliquer par son changement de poste au titre de l’année 2018, d’appréciations très élogieuses de sa hiérarchie sur l’ensemble de la période de référence.
  2. D’une part, il n’est pas contesté que les postes occupés par Mme JC, M. GC Mme CM, QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC, Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG qui ont été inscrits au tableau d’avancement, étaient tous des postes de niveau 3, et donc d’un niveau moindre à celui du requérant. Si les évaluations de YD et de M. UK font apparaître des sujétions particulières en lien avec le poste occupé qui s’exerce dans un secteur jugée difficiles, le ministre ne justifie pas que leurs dossiers auraient été d’une qualité supérieure à celui du requérant au regard des responsabilités particulières de leurs emplois.

 

  1. D’autre part, il ressort des pièces du dossier que les notes obtenues par A sur l’ensemble de la période de référence sont supérieures et que les appréciations littérales portées sur la manière de servir de l’intéressé sont globalement meilleures que celles attribuées à Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD.

A apparaît dès lors fondé à soutenir qu’en promouvant au grade de commandant Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG, alors que eu égard à ses compétences et aux responsabilités qui lui incombent, son dossier aurait mérité qu’il fût inscrit au tableau d’avancement de préférence à ces agents, l’administration a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation.

Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués, que l’arrêté du 22 mai 2019 relatif au tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 doit être annulé.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre les décisions individuelles de nomination au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 :

 Le présent jugement annule le tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019. Dès lors, l’ensemble des mesures individuelles de nomination intervenues en exécution de ce tableau et qui ne sont pas devenues définitives doivent être annulées par voie de conséquence. Il suit de là que les nominations de Mme JC, M. GC Mme CM, QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC, Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG qui ont été contestées dans le délai de recours contentieux et ne sont donc pas devenues définitives, doivent être annulées.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

Eu égard au motif d’annulation retenu, le présent jugement implique seulement, par application des dispositions de l’article L. 911-2 du code de justice administrative, que le ministre de l’intérieur réexamine la candidature de M. A, ainsi que celles des fonctionnaires dont les arrêtés de nominations sont annulés, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les conclusions indemnitaires :

A est fondé à soutenir que l’illégalité entachant l’établissement du tableau d’avancement litigieux constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat. Il sera fait une juste appréciation du préjudice matériel, moral et de carrière qu’il a subi en condamnant l’Etat à lui payer une indemnité de 1 500 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision.

Sur les frais liés au litige :

Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à M. A d’une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Les dispositions du même article font, en revanche, obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme H T, RM M. VD, Mme AS, Mme NS, M. EF et Mme VTsoit mise à la charge de M. A, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance.

 

D E C I D E :

 

 

Article 1er : L’arrêté du ministre de l’intérieur du 22 mai 2019 relatif au tableau d’avancement au grade de commandant de police au titre de l’année 2019 est annulé.

Article 2 : Les décisions portant nomination dans ce grade de Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l’intérieur de réexaminer la candidature de M. A Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 4 : L’Etat est condamné à verser une indemnité de 1 500 euros à M. A.

Article 5 : L’Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 7 : Les conclusions de Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent jugement sera notifié à M. A, au ministre de l’intérieur et des outre-mer, et à Mme JC, M. GC Mme CM, M. QD, Mme BD M. YD, M. EF M. WC,  Mme OP M.UK Mme,OP M.JK, M. FG

Délibéré après l’audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient : Mme Riou, présidente,

Mme Lambrecq, première conseillère, Mme Kanté, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5  janvier 2023.

La rapporteure, Lambrecq

La présidente, Riou

La greffière,Sueur

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.